Chabatz d'entrar !

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Albert GOURSAUD

Regards sur Albert Goursaud :

L'auteur de La Société Rurale Traditionnelle en Limousin.

 

 

Il m'a été agréable, dans cet essai bien modeste, facilité par des  relations familiales privilégiées de solliciter les témoignages et les souvenirs de ses enfants, Françoise Régnier et  Jacques Goursaud, et ceux de ses cousins Goursaud Henry  et  Cuisinier, Robert et  Yves

       

Déjà, dans les années soixante, à Babaudus  Albert présentait à ses jeunes cousins, ses films sur la batteuse, le bouéradour,  les travaux des champs……etc. La pêche à la truite, la construction des roues de moulin sur la Graine, ne suffisaient plus à leur curiosité.

 

J'imagine Albert Goursaud  quelques années plus tard : tantôt caméraman dans l'hélicoptère, pour les meilleures vues aériennes, tantôt à travers les découvertes sur la  météorite, tantôt  illustrant ses recherches  avec le numérique et « le mulot. »…etc. 

 

La biographie qui suit  est une invitation chaleureuse à la lecture et à la découverte patiente  d'une œuvre immense. Je l'ai parcourue en diagonale, avec beaucoup d'allers retours

Elle  m'apparaît comme la bible du terroir, le creuset de nos identités.

       

Albert Goursaud est  un sujet inépuisable. Je l'ai découvert des le début, de Babaudus  à  Saint Laurent, sur les notes de Félix Leclerc : « moi mes souliers ont beaucoup voyagé ».  Pour ceux  qui l'ont connu, ceux qui partagent sa connaissance et son amour du pays, de ses origines et la compréhension chaleureuse des habitants, son rayonnement est celui  d'un père spirituel.

 

Lucien CHABASSE

 

 

Albert GOURSAUD, 1899-1970

Biographie par Maurice ROBERT

 

Maurice Robert, ami d'Albert Goursaud, est ethnologue, chercheur honoraire au C.R.N.S.,auteur ou co-auteur d'une trentaine d'ouvrages sur la Société rurale, la langue limousine, les artisans et les métiers, les croyances populaires. Né en Haute-Vienne, il est un des meilleurs connaisseur de ce département

 

  «   Albert Goursaud est né à la Couronne (Charente), le 11 juin 1899, où son père, négociant  en vins, s'était  installé ; il  n'y passera que les toutes premières années de son enfance, car c'est dans leur pays d'origine, le Rochechouartais, en Haute-Vienne, que ses parents vinrent se fixer dans le hameau de Babaudus où  l'accueillit l'école publique au début de sa sixième année.

C'est dans ce gros hameau aux allures de village qu'entre l'école où il fut brillant, et la Nature  où il fut espiègle, il apprit à apprécier et à aimer les paysans, leur vie, leurs traditions.

La bourse qu'il obtint lui permit de poursuivre des études secondaires  dès 1911 au Collège de Saint-Yrieix-la-Perche, jusqu'à sa réussite au Baccalauréat.

Celui que son origine géographique fit désigner par le sobriquet de « Canon » fera au collège arédien de brillantes études, excellant dans les mathématiques – il refaisait, à l'issue du cours, la leçon de son professeur, M. Benoit, sans une erreur et  quelques fois avec une démonstration originale – les Langues – il laissait sur les livres de bibliothèque, sur les cahiers et sur les tableaux noirs, des inscriptions en allemand, en russe, en grec ou en arabe -- , la Géographie et l'Histoire.

Aimé de tous ses camarades, brillant sujet, déjà forte personnalité,  ce garçon aux cheveux dorés et frisés, au front large, au visage équilibré, avec un nez un peu charnu, aux yeux clairs  pétillant d'intelligence et parfois de malice, pouvait surprendre le «  bizuth  » qui le vouvoyait, par son ton faussement bourru : « fous-moi la paix, ici tout le monde se tutoie » .

Sous cette apparente rudesse se dissimulait une grande sensibilité qu'auraient pu nous restituer les vers qu'il dédiait à la blonde de ses rêves d'adolescent.

Albert Goursaud, élève de Maths-élém, passa brillamment son baccalauréat à une session anticipée et devança l'appel en 1918 pour choisir la marine.

Incorporé à Brest, il fut accueilli par un vieux premier quartier-maître breton : «  qu'est-ce que vous faites, vous ? ».- « Etudiant » - «  Etudiant ? alors au charbon ! » . Ces trois mois passés à coltiner le charbon à la pelle au sac, du quai à la soute, seront sans doute les plus durs de sa vie.

 

 

Il embarquera ensuite comme matelot sur le torpilleur Dehorter, pour participer à la chasse aux sous-marins allemands dans la mer du Nord.

Après l'armistice il sera affecté à la Commission Interalliée du Danube  qu'il sillonnera sur l'ancien yacht de l'empereur François-Joseph. Il en profitera, vrai polyglotte, pour apprendre le hongrois ; le quartier-maître timonier Goursaud , démobilisé, sera interprète agrée de hongrois de la Marine Nationale, ce qui lui vaudra de servir à ce titre, au cours de la seconde guerre mondiale, sur les Croiseurs «  Montcalm  » et  «  Gloire  ».

 A Paris il préparera une licence en droit, marquant le même goût pour l'étude, sans cesser de s'intéresser à la vie quotidienne et à l'exercice du corps : il sera, pendant trois ans, le talonneur efficace d'une équipe de rugby du P.U.C. dont son ami Pierre Meillaud était le capitane.

En 1923, il est admis sur concours, en qualité de rédacteur, au Ministère  de la Marine où il fera carrière.

En 1925 il épouse, à Rochechouart, Edmée Goursaud qui sera la fidèle et dévouée compagne de toute sa vie laborieuse. Leur naîtront deux enfants, garçon  et fille, joie et fierté d'un père attaché aux valeurs familiales.

Le pays de son enfance, berceau de sa  proche famille et de celle de son épouse, l'attirait et tout congé était  l'occasion d'un retour  attendu, et d'enquêtes assidues ; il y nouait de nombreuses relations qui prolongeaient ses actives recherches ethnographiques. La passion de l'étude ne le quittait pas : l'année où il recevait les insignes de Chevalier dans l'Ordre de la Légion d'Honneur, il préparait le diplôme de l'Ecole Nationale des Langues Orientales (1936) ;  au cours des trois années qui suivirent sa retraite il fréquenta assidûment les cours d'ethnographie française à l'école du Louvre.

Il acheva sa carrière avec le rang de Contre-Amiral, en qualité  d'Administrateur Général  des Services Centraux  du Ministère  de la Marine.

Ses fonctions et occupations lui laissaient  encore le temps de s'intéresser au cinéma amateur, au bricolage où il se montrait très adroit, et au jardinage. Il avait voulu acquérir, à Limoges, un appartement, pour pouvoir, encore mieux,  accomplir ses travaux scientifiques et ses études locales

auxquels son épouse  prenait grand intérêt.

Trop tôt, en septembre 1970, alors qu'il préparait le dernier volume de son œuvre patiente et féconde, il fut enlevé à l'affection des siens et à l'amitié de tous ceux qui l'avaient  approché et aidé.

 Il avait été élevé au grade d'Officier de la Légion d'Honneur en 1947 et fait Cavalier du Mérite maritime en 1960.

 Il repose en terre limousine, ce pays qui lui sera éternellement redevable  d'une grande œuvre, à Saint-Laurent-sur Gorre. »

 

Maurice ROBERT

Transcription : Lucien CHABASSE

 

 

 

 



31/01/2007
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