Les Ostensions limousines
Les Ostensions sont des manifestations religieuses millénaires et spectaculaires, particulières au diocèse de Limoges. Le mot Ostension signifie montrer, donner à voir, présenter. Du Latin « ostendere », action de montrer.
C'est un moment fort de rassemblement où se côtoient des membres du Clergé, des autorités civiles et militaires, et le peuple limousin. Ces célébrations, uniques en France, revêtent un caractère identitaire incontournable pour les Limousins. Elles se situent entre le profane et le sacré.
Les reliques des saints et saintes limousins sont exposées dans les églises à la vénération des fidèles mais aussi sorties dans les rues pavoisées et sur les places des communes dites « ostensionnaires » au cours de processions religieuses, parfois accompagnées de cortèges historiques.
Les reliques sont conservées depuis des siècles dans des châsses et reliquaires, oeuvres d'art de limousins experts dans l'art de l'émail et de l'orfèvrerie.
La grande châsse de saint-Martial (Eglise saint-Michel des Lions)
Elle se trouve dans le tombeau de l'autel édifié en 1889 en l'honneur de saint Martial.
En bois de chêne, recouvert de cuivre doré, elle pèse 450kg.
Huit panneaux représentent les miracles de saint Martial.
L'ouverture en est faite au moyen de quatre clés :
La première appartient à Monseigneur l'évêque de Limoges,
la seconde à Monsieur le Maire de la Ville de Limoges,
la 3ème à Monsieur le curé de l'église saint Michel-des-Lions,
la 4ème au Premier Bayle de la Grande Confrérie de saint Martial.
Sur le bas se lit l'inscription
"J'appartiens à messieurs les confrères de la Grande Confrérie de saint Martial. An 1809."
Les Ostensions en Limousin sont une particularité religieuse et culturelle en France. Témoignage d'une foi séculaire, elles ont un sens religieux profond pour les Limousins. Aujourd'hui encore, elles mobilisent la population dans les 19 communes où elles sont organisées, par des préparatifs pendant de nombreux mois.
Ces fêtes se déroulent tous les sept ans. En 2009, les 71ème Ostensions sont célébrées dans 19 cités : 1 en Creuse, 1 dans la Vienne, 2 en Charente Limousine, 15 en Haute-Vienne.
Dans quelles circonstances ont-elles été organisées ?
Tout d'abord, pour supplier à l'occasion d'épidémies (Mal des Ardents, appelé encore feu sacré).
En effet, en 994 de grandes pluies ravagèrent l'Aquitaine. Le seigle était alors l'aliment de base de nos populations. Dans ces conditions l'ergot de seigle se développa et fut la cause de l'épidémie. L'ergotisme gangreneux trouva au sein de populations aux conditions de vie précaires et rudes, un terrain de choix pour se propager. Le terrible fléau apparut à Limoges ainsi que dans toute l'Aquitaine, la Touraine et jusqu'en Bourgogne.
Pour supplier encore au moment d’inondations, d’incendies, de famine, les habitants ont pris l’habitude d’exposer les reliques de leurs saints.
Ensuite, pour accueillir un personnage exceptionnel (papes, rois, reines...) qui honorait la ville de sa présence, notamment Limoges, en venant vénérer ses saints protecteurs.
Depuis le début du XVIème siècle, il a été décidé que le rythme septennal convenait bien à ces manifestations.
Il y a eu une interruption uniquement entre 1790 et 1806.
Les premières Ostensions
Le premier rassemblement connu des reliques a eu lieu en 994 à Limoges.
Celles de Saint-Léonard semblent être contemporaines à celles de Limoges en 1016.
A Saint-Junien, elles sont connues depuis 1046.
Celles de Saint-Yrieix (Arédius) sont attestées depuis 1603.
A Aureil, elles sont connues depuis 1609 et au Dorat depuis 1659.
A Javerdat, elles sont célébrées tous les sept ans depuis 1741.
LIMOGES 18 et 19 AVRIL
Les Ostensions de Limoges sont les plus anciennes (994).
statue de saint-Martial, église saint-Michel des Lions
Elles célèbrent :
- Saint Martial, premier évangélisateur du Limousin au début du IVème siècle.
- Saint Aurélien, deuxième évêque de Limoges. Son corps fut solennellement élevé de terre en 1316 dans l'église saint Cessateur de la ville et conservé ensuite dans la chapelle qui porte son nom. Il est patron de la corporation des bouchers.
- Saint Loup évêque de Limoges au VIIème siècle, signataire en 632 de la Charte de l'abbaye de Solignac, fondée par Solignac. Enseveli à saint Martial, son corps fut transféré le 6 septembre 1158 à saint Michel-des-Lions.
Buste reliquaire de sainte-Valérie, église saint-Michel des Lions
- Sainte Valérie, martyre, proche de saint Martial par son ensevelissement, son corps fut transféré au monastère
de Chambon sur Voueize dans la Creuse, qui dépendait de l'abbaye de saint Martial.
L'abbaye de saint Martial fut détruite de 1791 à 1807. Dès le 17 décembre 1790, l'ordre de démolition ayant été donné, le chef de saint Martial fut transféré dans l'église de saint Michel-des-Lions, au milieu d'une vive émotion populaire.
Le 24 janvier 1793, la châsse de saint Martial fut brisée, mais deux officiers municipaux, délégués pour cette œuvre impie, sauvèrent la précieuse relique du saint Apôtre, qui fut conservée avec respect dans leur famille et restituée au clergé de saint Michel lors de la restauration du culte. Son authenticité fut solennellement reconnue par Mgr du Bourg, évêque de Limoges, le 13 juin 1803. Un autel monumental a été élevé par souscription dans l'église saint Michel et consacré par Mgr Renouard, le 10 juillet 1889.
La ville de Limoges par ses anciennes armoiries et par sa devise « Dieu garde la ville et saint Martial les gens »,
tient à célébrer saint Martial et ses compagnons.
ABZAC (Charentes) 13 AVRIL
Vers 1670, le Pape Clément IX a offert à Louis-Victor de Rochechouart de Mortemart, duc de Vivonne (1636-1688), alors ambassadeur du Roi de France à Rome, les reliques de saint Lucius et saint Émérite, deux saints martyrs de l'église primitive.
Or, le duc de Vivonne, maréchal de France, frère de Madame de Montespan, était le châtelain de Serre à Abzac qu'il tenait de sa mère, Diane de Grandsaigne, et c'est dans la chapelle du château de Serre que furent d'abord placées ces reliques.
Le 16 juillet 1762, les reliques de saint Lucius et de saint Emérite sont vérifiées par Philippe Rabilhac, curé d'Oradour-Fanais, et, le 26 juillet 1762 Mgr du Plessis d'Argentré, évêque de Limoges, donne à la paroisse d'Abzac la permission de les exposer et de les vénérer.
Depuis cette date, elles sont sous la garde du curé et des habitants d'Abzac, et font l'objet, selon la coutume limousine, d'Ostensions septennales.
SAINT-VICTURNIEN 3 MAI
C'est au bord de la Vienne dans ce qui est appelé « la vallée ténébreuse » que vécut saint Victurnien.
Ermite du VIIème siècle, souvent prié pour soulager des maux du corps comme de l'esprit.
Les Ostensions sont l'occasion de décorer la cité aux couleurs bleu et blanc, avec des sapins et des arches de bambous.
JAVERDAT 8 MAI
Javerdat est une des plus petites paroisses de campagne du diocèse de Limoges qui ait maintenu les fêtes traditionnelles des Ostensions.
Les habitants y restent attachés avec un soin pieux et jaloux. Ils mettent tout en œuvre pour bien les célébrer autour de saint Blaise, leur saint patron depuis 1741.
SAINT-JUST-LE-MARTEL 9 MAI
Saint Just est un des enfants du pays vénéré parmi les saints limousins.
Il aurait lancé son marteau là où est édifiée aujourd'hui l'église. Il aurait vécu au IVème siècle, parti en pèlerinage à Rome, il viendra mourir dans son pays natal et sera enterré à Saint-Just-Le-Martel.
NEXON 10 MAI
La cité honore saint Ferréol. Evêque de Limoges, il est le 15ème successeur de saint Martial, ami de Arédius (Yrieix) au VIème siècle. Il aurait eu à calmer les fureurs populaires contre les exactions des rois mérovingiens et aussi à reconstruire saint Martin de Brive incendié.
Il assista au Concile de Mâcon en 585, où l'on visa à restaurer la pratique dominicale. Il présida les obsèques de saint Yrieix en 591.
Les habitants de Nexon se mobilisent d'une manière unique pour la préparation des Ostensions qui se déroulent dans le bourg et dans le parc du château.
AUREIL 21 MAI
C'est au XIème siècle que vécurent saint Gaucher et saint Faucher son disciple. Saint Gaucher vient de Melan sur Seine dans le Vexin et se rend tout d'abord à Saint Léonard pour prier sur la tombe de Léonard. A quelques kilomètres de là, il fonde le monastère d'Aureil et un prieuré de femmes au Bost la Mongeas. Saint Etienne de Muret vient se former auprès de lui.
Il était un prédicateur populaire renommé. Il mourut octogénaire le 9 avril 1140 des suites d'un accident (chute de son cheval).L'évêque de Limoges le canonisa en 1194 avec l'autorisation du Pape Célestin III.
En 1609, le Pape Paul V reconnaît les Ostensions d'Aureil. Elles conservent un caractère champêtre unique sur l'espace du plateau de Limoges que saint Gaucher a marqué de son empreinte.
AIXE-SUR-VIENNE 23 MAI
Les premières Ostensions datent de 1876. Le sanctuaire de Notre Dame d'Arliquet est son centre spirituel.
La procession se déroule sur plus de deux kilomètres dans un fastueux décor de verdure, de fleurs confectionnées depuis des mois par les habitants enthousiastes de la renommée de leurs Ostensions.
Ce sont les seules ayant pour origine un sanctuaire marial.
SAINT-LEONARD 24 MAI
Saint-Léonard et un prisonnier
ROCHECHOUART 31 MAI
C'est dans le cadre de l'ancienne cité de Rochechouart, autrefois siège d'un important Vicomté, que les habitants honorent saint Julien de Brioude. Julien était soldat de l'armée romaine à la fin du IIIème siècle. Né à Vienne, dans le Dauphiné, il fut décapité à Brioude en 304.
D'abord Patron de l'église de Biennac, il devint également celui de la paroisse de Rochechouart à sa création en 1782.
Le jour des Ostensions, la ville est somptueusement décorée aux couleurs des différents quartiers. Des milliers de personnes se rassemblent place du château pour la grande cérémonie finale.
ESSE (Charente) 1er JUIN
C'est depuis 1660, que les habitants de Esse en Charente limousine, sont autorisés à exposer les reliques des saints, notamment celles de saint Etienne.
Il est à noter que la Charente limousine était attachée au Limousin jusqu'à la Révolution et faisait partie du diocèse de Limoges. Au moment de la création des départements, la Charente limousine a été rattachée à la Saintonge et fait maintenant partie du diocèse d'Angoulême.
LE DORAT 6 JUIN
Saint-Théobald
La ville vit sous la protection de deux saints Israël et Théobald, enfants du pays.
Israël est né près du Dorat au milieu du Xème siècle. Très doué et vertueux, il fut remarqué par l'évêque de Limoges Hilduin qui le prit comme chapelain et en fit son auxiliaire en raison de son éloquence et de son jugement. Généreux envers les pauvres et accueillant envers les victimes du mal des Ardents, il mourut le 22 décembre 1014.
Théobald, originaire de la Marche, fit ses études à Périgueux. Il se mit au service de Dieu quelques décennies après la mort d'Israël. Très assidu à la prière, il fut choisi comme trésorier de l'église du Dorat et comme enseignant. Il mourut le 6 novembre 1070.
Leurs deux corps furent placés dans la crypte de l'église le 27 janvier 1130 et transférés le 13 septembre 1659 de chaque côté de l'autel majeur.
Cette date marque le début des premières Ostensions septennales.
Le Dorat, ancienne place forte de Basse Marche et centre spirituel a toujours célébré avec faste et traditions militaires ses Ostensions en l'honneur des deux saints.
CHAPTELAT 7 JUIN
Saint Eloi, orfèvre, argentier et conseiller de Clotaire II et de Dagobert est né à Chaptelat vers 588.. C'est pourquoi, la commune le vénère.
Les renseignements que nous connaissons sur saint Eloi ont été transmis par saint Ouen, évêque de Rouen au VIIème siècle.
Eloi fut mis en apprentissage chez Abbon, l'orfèvre responsable de l'atelier monétaire royal implanté dans la cité de Limoges. Ses talents lui valurent d'être envoyé à Paris chez Bobon, orfèvre royal.
Eloi aurait été remarqué par Clotaire II qui lui commande non seulement des objets d'orfèvrerie mais encore lui confie d'importantes responsabilités dans le domaine monétaire.
Laïc vertueux, malgré ses richesses, il employait celles-ci à la libération des captifs.
A la mort de Dagobert, son existence prend une toute autre dimension ; il se consacre essentiellement à la christianisation des pays Flamand et Nordique. Vers 641, il est ordonné évêque de Noyon. C'est là qu'il meurt vers 660 et y est enterré.
Il fonda le monastère de Solignac.
Ce n'est qu'au milieu du XIXème siècle qu'une relique de saint Eloi (son bras droit) a été acquise par la paroisse de Chaptelat, ceci grâce à l'obstination du curé, originaire du Nord, où le culte de saint Eloi était très présent.
Il a estimé que la dévotion à saint Eloi devait se développer sur le lieu même de sa naissance.
Saint Eloi est le patron des orfèvres, des forgerons et de tous les travailleurs du métal et des arts du feu.
EYMOUTIERS 13 JUIN
Eymoutiers revient cette année dans le groupe des cités ostensionnaires.
Les reliques de saint Psalmet , ermite du VIème siècle, sont conservées dans la collégiale d'Eymoutiers.
Il serait arrivé d'Irlande par un port de Saintonge et recherchant la solitude se serait fixé à Eymoutiers. Il récitait le psautier et priait beaucoup, ce qui lui valut le nom de Psalmet.
A sa mort, vers 630, il fut inhumé au bord de la Vienne et sur son tombeau on fit construire une petite église. Cette église était desservie par des chanoines dont le monastère se trouvait au pied d'une colline, c'est-à-dire « Ayen-moutiers » ou Aymoutiers qui devint Eymoutiers.
CHARROUX (Vienne) 14 JUIN
En 989, un concile s'est tenu à Charroux qui pose les premiers jalons du mouvement spirituel et social que l'on nomme « la paix de Dieu, la trêve de Dieu ».
L'Eglise entendait modérer les guerres féodales et posait la question du respect de la personne humaine.
La cité vénère les reliques de saint Sulpice.
SAINT-YRIEIX-LA-PERCHE 21 JUIN
Né à Limoges, de parents nobles au VIème siècle, Yrieix (Arédius) est le mieux connu des premiers saints limousins. Sur son domaine d'Attane, il fonde un monastère de règle bénédictine. Bâtisseur d'églises, Yrieix fut surtout un fervent pèlerin qui visitait les sanctuaires renommés et les personnages religieux du voisinage comme sainte Radegonde de Poitiers.
Il mourut en 591.
Les Ostensions ont repris en 1925. Elles gardent un caractère particulier, moins inscrites dans des rites immuables, parce que peut être plus éloignées de la Vienne et proches de la Corrèze et de la Dordogne.
SAINT JUNIEN 28 JUIN
Les Ostensions en l'honneur de saint Junien et saint Amand , ermites du VIème siècle, sont actuellement les plus renommées par l'ampleur du cortège historique qui rassemble plus de 100 000 personnes.
Célébrées depuis 1211 et septennales depuis 1519, elles sont après Limoges et avec celles de Saint Léonard les plus anciennes.
Le tombeau de saint Junien attirait à Comodoliac les malades en foule dès la fin du VIème siècle. Le tombeau de saint Amand, qui aurait été le maître spirituel de saint Junien, fut retrouvé sur place à la fin du XIème siècle.
Lors des Ostensions, la cité se transforme en forêt de Comodoliac. Les rites ancestraux se perpétuent avec originalité et minutie : élection du président, sortie des Suisses, bénédiction des drapeaux, costumes d'apparats, stations représentant la vie des saints. La mobilisation de la population est légendaire.
CROCQ (Creuse) 5 JUILLET
La cité de Crocq appartient à l'arrondissement d'Aubusson. Ici saint Eloi y est à l'honneur. L'église renferme un triptyque su saint avec différentes scènes : sa naissance, l'orfèvre, le protecteur des pauvres et son sacre.
PIERRE-BUFFIERE 4 OCTOBRE
Saint Côme et saint Damien seront honorés à Pierre-Buffière. Ce sont deux saints martyrs dont les origines remontent aux origines de la chrétienté.
Ce sont les patrons des médecins.
Une confrérie s'est constituée en 2008 avec des professionnels de la santé.
http://site.voila.fr/eglise.st.michel
http://ostensions-2009.site.voila.fr/
Dominique ROSSI